L’Écriture automatique : Voix de l’invisible ou miroir de l’âme ?
L’écriture automatique fascine, dérange, inspire. Depuis les cercles spirites du XIXe siècle jusqu’aux mystiques modernes, cette pratique est décrite comme un canal entre l’humain et l’invisible, un passage par lequel une main guidée transmet des messages venus d’au-delà de la conscience ordinaire. Mais de quoi s’agit-il vraiment ? Est-ce une communication avec les morts, une percée de l’inconscient, ou un accès à des dimensions supérieures de l’esprit ?
Qu’est-ce que l’écriture automatique ?
L’écriture automatique consiste à laisser sa main écrire sans contrôle conscient, en état de réceptivité ou de transe légère. Le praticien tient un stylo, se met dans une disposition mentale neutre, et laisse venir ce qui s’impose, sans réfléchir, sans corriger. Les mots s’écrivent parfois seuls, parfois dans une sorte de dialogue fluide.
Elle peut être pratiquée :
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en état de relaxation ou de transe légère,
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dans un but divinatoire, thérapeutique, spirituel ou créatif,
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comme outil de contact avec l’au-delà ou d’exploration intérieure.
1. Allan Kardec et le spiritisme codifié
Le codificateur du spiritisme, Allan Kardec (1804–1869), est l’un des premiers à avoir structuré et légitimé l’écriture automatique comme moyen de communication avec les esprits.
Dans Le Livre des Médiums (1861), il décrit plusieurs techniques de médiumnité, dont l’écriture automatique qu’il appelle médiumnité mécanique. Il distingue :
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la médiumnité mécanique : la main est mue par une force extérieure sans que la conscience du médium intervienne,
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la médiumnité intuitive : l’esprit du médium perçoit le message et le traduit par écrit.
Pour Kardec, les esprits ne sont pas forcément des défunts proches mais peuvent être :
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des entités bienveillantes ou inférieures,
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des guides spirituels ou esprits errants.
Il insiste sur la nécessité de discernement et de pureté morale pour éviter les messages mensongers ou confus.
2. Les spirites du XIXe siècle : Smith, Flammarion, Crookes
Hélène Smith (1861–1929)
Cette médium suisse fascinait par ses transes profondes et ses récits de vies antérieures écrits automatiquement (notamment une vie sur Mars). Le psychologue Théodore Flournoy, dans Des Indes à la planète Mars, l’a étudiée en y voyant à la fois un phénomène spirite et une création subconsciente symbolique.
Camille Flammarion et William Crookes
Ces chercheurs ont vu dans l’écriture automatique une preuve possible de la survie de la conscience, tout en appelant à des méthodes rigoureuses d’observation.
3. P.J. Oune et la médiumnité pure
Pour l’auteur P.J. Oune, figure de la mystique contemporaine, certainement décédé avant l’an 2000, la pratique de l’écriture automatique ne limite pas l’esprit de l’homme à une communication avec les défunts, mais propose de revenir à la source, d’unir le visible et l’invisible afin de retrouver l’unité. il pense que l’écriture peut permettre la connaissance, gnose mystique élevant l’esprit.
Pour Oune, l’homme communique de tous temps avec l’invisible et donc, toute codification, tout dogme, maître et autre invention des hommes ne représente rien… car il estime que tout homme peut dialoguer avec l’unité. Il ne s’agit pas ici de convoquer des esprits, mais d’apprendre par l’écriture pour s’élever par la connaissance de soi et le nettoyage de l’ego afin de quitter progressivement des communications ordinaires pour recevoir par l’ecriture les enseignements de ce qu’il nomme: l’Esprit. Ainsi l’homme poursuit son chemin, sans jamais chercher à imposer quoi que ce soit à autrui.
4. Écriture automatique vs Écriture inspirée
On distingue souvent deux formes :
1. Écriture automatique stricte
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La main écrit seule, parfois avec des graphies inconnues.
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Le médium ne comprend pas toujours ce qu’il écrit.
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Parfois lente, parfois fulgurante.
2. Écriture inspirée
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L’esprit reçoit un message, puis l’écrit en conscience partielle ou totale.
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Le médium formule les mots, mais sous impulsion intérieure.
5. Comment pratiquer l’écriture automatique ?
Préparation
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Lieu calme, protection (bougie, prière, encens).
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Intention claire : demander la lumière, l’élévation.
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Ancrage et centrage (voir techniques de magnétisme).
Pratique
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Assieds-toi confortablement.
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Détends-toi, respire profondément.
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Pose une question ou reste ouvert(e).
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Prends un stylo et laisse venir : ne réfléchis pas, ne relis pas tout de suite.
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Ne force rien. Si rien ne vient, repose-toi et réessaie plus tard.
Après
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Relis sans jugement.
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Note les répétitions, le style, les émotions perçues.
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Garde un cahier dédié pour suivre l’évolution.
6. Risques et discernement
Comme toute pratique de médiumnité, l’écriture automatique n’est pas sans danger.
Risques :
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Absorption de messages trompeurs ou négatifs,
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Dépendance à la pratique,
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Mélange avec des troubles psychiques non identifiés,
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Ego mystique (se croire messie, élu…).
Conseils :
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Toujours pratiquer dans l’humilité, la paix, la clarté.
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Ne jamais forcer l’écriture.
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Ne pas abandonner son discernement personnel.
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Éviter de chercher le sensationnel.
Conclusion
L’écriture automatique est un art sacré, à mi-chemin entre la médiumnité, la mystique et la créativité profonde. Si Kardec l’a encadrée dans une logique spirite méthodique, P.J. Oune en propose une lecture plus intérieure et unitive, comme un lien entre l’âme et la Source, plutôt qu’un dialogue avec les morts.
Elle peut devenir un outil de transformation, d’écoute intérieure et de connaissance subtile, à condition de rester vigilant, centré et humble.
Les textes issus de l’écriture automatique spirite offrent surtout un témoignage de communication prétendue avec les esprits, souvent sans style ou cohérence narrative. En revanche, l’écriture inspirée contemporaine privilégie un langage fluide, personnel et symbolique, orientée vers l’épanouissement intérieur. Enfin, chez les surréalistes, l’écriture automatique devient un outil d’expression artistique, désincarnée et poétique.
Les écrits de P.J. Oune relèvent d’une voie initiatique inspirée qui dépasse le cadre strict du spiritisme kardécien. On y retrouve une fusion mystique, proche de la gnose ou de la théosophie, mais avec une simplicité qui évoque les Évangiles, la voix du cœur, et l’appel à la transformation par l’amour.
Alors que Kardec structure une philosophie morale spirite, Oune propose un cheminement spirituel incarné, poétique, affectif, et profondément mystique. Ce n’est pas tant une doctrine qu’un appel à la foi active et au service des autres et de l’invisible, sans rattachement à un dogme ou un pseudo-gourou.
Mais d’opposition, nous dirions qu’il n’en est rien car les hommes cherchent, de tous temps. Qui peut dire, j’ai la vérité? Oune disait que « La vérité est multiple comme les visages de Dieu » et « L’Esprit souffle où il veut, quand il veut.. ».
Parfois l’invisible parle par des canaux clairs, rigoureux, méthodiques, comme ceux qu’a réunis Allan Kardec pour bâtir la doctrine spirite. D’autres fois, il se fraie un chemin dans la douceur d’un cœur blessé, dans la solitude d’un être qui se laisse traverser, comme ce fut le cas de P.J. Oune.
D’un côté, Kardec, le philosophe de l’Au-delà, bâtisseur d’un édifice rationnel ouvert à la foi raisonnée.
De l’autre, Oune, le mystique moderne, poète de l’Esprit, amoureux du silence et de la lumière.