Histoire du tirage des cartes

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Histoire du tirage des cartes

L’histoire du tirage des cartes s’inscrit dans un long cheminement où se croisent le jeu, la divination et les grandes transformations spirituelles de l’humanité. Dès ses origines, le tirage des cartes est un miroir : il ne prédit pas l’avenir au sens strict, mais dévoile les lignes de force invisibles qui traversent la vie d’un individu, les énergies en mouvement, les possibilités latentes. Pour comprendre comment cette pratique a traversé les siècles, il faut remonter bien avant l’invention du jeu de cartes tel qu’on le connaît aujourd’hui, vers les premiers gestes symboliques des devins de l’Antiquité.

On trouve, dans l’Égypte ancienne, les prémices d’une pensée symbolique fondée sur les figures et les correspondances. Les prêtres de Thèbes, les initiés d’Héliopolis lisaient les signes dans les entrailles, les songes, les formes naturelles, et parfois dans les objets jetés sur des plateaux rituels. Il ne s’agissait pas encore de cartes, mais déjà d’un langage par images. Plus tard, chez les Grecs, la pratique de la mantique par les objets devient plus précise. L’oracle, qu’il s’exprime par les dés ou par les feuilles de laurier, est toujours un dialogue avec l’invisible. Ce n’est qu’avec l’arrivée des peuples nomades, probablement d’origine indienne, qu’un élément essentiel entre en scène : les figures mobiles sur supports plats. Ces peuples, porteurs de traditions ésotériques profondes, auraient contribué à la diffusion d’un savoir iconographique ésotérique à travers l’Asie centrale, l’Empire byzantin, puis l’Europe.

Au tournant du IXe et Xe siècle, les premières formes de cartes apparaissent dans la sphère islamique. Les mamelouks d’Égypte utilisaient des cartes à jouer richement ornées, qui, si elles servaient sans doute à des jeux, n’étaient pas exemptes d’interprétations symboliques. À cette époque, le monde musulman était un creuset de sciences, d’astrologie, de mathématiques et d’alchimie. Ce contexte favorisa la création d’outils hybrides, à la frontière du ludique et du divinatoire. Les cartes traversèrent ensuite la Méditerranée pour rejoindre l’Europe chrétienne, d’abord en Espagne et en Italie. Là, elles devinrent jeu, mais aussi langage caché.

C’est au XVe siècle que le tarot, dans sa forme archaïque, fit son apparition en Italie du Nord. On l’appelait alors « carte da trionfi » — cartes des triomphes. D’abord luxueuses, peintes à la main, elles mettaient en scène des archétypes issus de la tradition chrétienne et païenne : la mort, la tempérance, la papesse, le diable, le monde. Rien n’indique que ces premières cartes furent immédiatement utilisées à des fins divinatoires. Pourtant, la symbolique était si forte, si dense, que leur emploi dans un cadre de méditation ou d’interrogation intérieure ne pouvait tarder. Au fil des décennies, la frontière entre jeu noble et outil initiatique s’effaça lentement.

Au XVIIe siècle, les cartomanciennes commencent à apparaître dans les villes d’Europe. Souvent marginales, parfois persécutées, elles lisent les cartes en même temps qu’elles lisent les visages, les lignes de la main ou les astres. Le jeu de cartes ordinaire, issu des figures françaises (cœur, carreau, trèfle, pique), devient un outil privilégié. Ces cartes, plus accessibles que le tarot aristocratique, permettent une lecture rapide, intuitive, presque quotidienne. Les associations symboliques entre les figures et les réalités humaines se précisent : le roi de cœur devient un père ou un mari, le neuf de pique un deuil, le valet de trèfle un message. Le tirage s’installe alors dans les marchés, les boudoirs, les rues, et s’adresse autant aux nobles inquiets qu’aux domestiques amoureux.

Mais c’est au XVIIIe siècle que le tirage des cartes prend une tournure plus ésotérique avec les travaux de personnages comme Court de Gébelin et Etteilla. Le premier voit dans le tarot une survivance des mystères égyptiens, une sorte de livre sacré codé par l’image. Le second propose une méthode structurée de divination par les cartes, qu’il lie à l’astrologie, à la kabbale et à l’alchimie. Le tirage devient alors un art, avec ses règles, ses écoles, ses jeux spécialisés. On n’interprète plus seulement selon l’intuition : on apprend, on étudie, on pratique. Le tirage entre dans les cercles occultes, devient un vecteur de connaissance, un chemin de transformation.

Au XIXe siècle, la cartomancie connaît un véritable âge d’or. L’occultisme parisien, les cercles rosicruciens, les loges ésotériques redonnent au tarot un rôle central dans la quête de vérité. Des figures comme Papus, Eliphas Lévi, Oswald Wirth tentent de reconstruire un savoir hermétique cohérent à travers le tarot. Le tirage devient alors une méditation, une révélation progressive du soi profond. Les cartes cessent d’être de simples images : elles deviennent des portes, des miroirs de l’âme. Les lames majeures représentent les étapes de l’initiation, les chemins de l’âme humaine, les lois cosmiques.

Le XXe siècle voit l’explosion de la cartomancie populaire, portée par des figures féminines emblématiques comme Mademoiselle Lenormand, qui influence toute une génération de devins. Les oracles se multiplient : l’Oracle Belline, le Tarot de Marseille restauré, le Tarot Rider-Waite, les jeux de 32 cartes, les oracles astrologiques. Le tirage n’est plus réservé aux initiés. Il entre dans les salons, les émissions de radio, les rubriques des magazines. Il devient parfois objet de spectacle, parfois confident d’angoisse. Dans le même temps, il conserve une dimension initiatique dans certains cercles restés fidèles à l’enseignement secret.

Aujourd’hui, le tirage des cartes connaît un renouveau. À l’heure du numérique et de la spiritualité décomplexée, les cartes parlent encore. Elles s’invitent sur les réseaux sociaux, les plateformes de développement personnel, les consultations en ligne. Mais leur fonction reste la même : elles offrent un espace de dialogue entre le visible et l’invisible, entre la conscience et l’inconscient, entre le destin et la liberté. À travers les siècles, les supports ont changé, les formes ont évolué, les méthodes se sont enrichies. Mais le cœur du tirage reste inchangé : écouter ce que les symboles ont à dire, et à travers eux, entendre le murmure du monde…. un art que notre amie Katia pratique depuis plusieurs décennies et vous prodiguera lors d’un tirage de tarot ou d’oracle… avec son sourire habituel !