Égypte Ancienne : Divination et Messages des Dieux

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Égypte Ancienne : Divination et Messages des Dieux

Dans l’Égypte ancienne, la divination n’était pas considérée comme une pratique marginale ou superstitieuse : elle faisait partie intégrante de la sagesse sacrée (Sia), une branche de la connaissance divine. Voir le futur, interroger les signes ou interpréter les rêves n’était pas une tentative de prédiction hasardeuse, mais un dialogue structuré avec le divin, inscrit dans un univers où tout, absolument tout, est symbole.

Les anciens Égyptiens vivaient dans un monde animé, habité, sacré. Chaque événement, chaque rêve, chaque anomalie naturelle ou émotion subtile était potentiellement un message de l’au-delà, émis par les dieux ou par les forces de l’ordre cosmique (Maât).


I. Une cosmologie propice à la divination

L’univers comme parole symbolique

L’Égypte ne concevait pas l’univers comme une mécanique aveugle, mais comme une structure vivante régie par des lois divines. L’homme y évolue en lien étroit avec :

  • Maât : la vérité, la justice, l’ordre cosmique.

  • Sia : la connaissance intuitive, la sagesse innée.

  • Hou : la parole créatrice.

Ces principes sont des entités divines incarnées dans les hiéroglyphes, les rituels, les sons, les songes. La divination est alors une écoute sacrée de ces lois invisibles.

« Celui qui connaît les noms des choses, connaît leur pouvoir » – Enseignement des prêtres de Thot.


II. Les supports de divination

1. Les songes : messages nocturnes des dieux

Le rêve était l’un des moyens les plus nobles de communication avec le divin. Le dieu Thot, patron des scribes et des sciences sacrées, était également dieu des rêves inspirés.

Des temples spécifiques, comme ceux de Sérapis ou d’Imhotep, accueillaient des pèlerins en quête de guérison ou de réponses à travers des pratiques d’incubation onirique. Le fidèle dormait dans une salle sacrée, et le rêve survenait, porteur d’un message symbolique.

Des papyrus de rêves — comme le Papyrus Chester Beatty III — contiennent des catalogues d’interprétations oniriques. Par exemple :

  • Rêver de naviguer sur l’eau : bon présage, protection divine.

  • Rêver de se voir nu : attention, humiliation à venir.

Les rêves étaient classés comme bons ou mauvais selon la polarité symbolique. C’est une des premières formes de clé de lecture divinatoire codifiée.


2. L’oracle : paroles des dieux

L’Égypte antique connaissait les oracles bien avant la Grèce. Les statues des dieux étaient parfois transportées dans des barques sacrées, et répondaient aux questions du peuple.

Les prêtres posaient des questions à haute voix, et la barque se mouvait d’un côté ou de l’autre — selon une technique qu’on peut assimiler à une forme ancienne de radiesthésie collective. Le dieu, via sa statue animée, répondait par des signes physiques.

Les temples d’Amon à Karnak et de Thot à Hermopolis étaient réputés pour ces pratiques.


3. La divination par les signes naturels

Les Égyptiens prêtaient une attention extrême aux événements naturels :

  • Le vol des oiseaux, les tremblements de terre, les crues du Nil, les éclipses…

  • Les comportements des animaux sacrés (comme l’ibis de Thot, le scarabée, ou le crocodile de Sobek) étaient interprétés comme manifestations de volontés divines.

Un événement inhabituel dans la nature pouvait entraîner une modification des rituels, un changement dans la politique royale, ou une prophétie publique.


4. Les statues parlantes et supports magiques

Des amulettes, statuettes et objets rituels étaient utilisés pour attirer des réponses. Certaines statues de divinités étaient creuses et dotées de systèmes acoustiques permettant aux prêtres de parler en leur nom — renforçant l’impression de réponses surnaturelles.

Les oracles de rêve, les talismans astrologiques, ou les supports de géomancie primitive ont également été retrouvés.


III. Les figures divinatoires

Thot : le dieu de la connaissance invisible

Thot, à tête d’ibis ou de babouin, est le maître du temps sacré, du verbe créateur, et du langage mystique. Il est le dieu des scribes, des calculs, de l’astrologie et de la parole prophétique. Il est dit :

« Thot connaît ce qui n’a pas encore été dit. »

Il est l’archétype du prophète silencieux, du voyant instruit par l’écriture divine.

Les prêtres-lecteurs (Kher-Heb)

Ces prêtres spécialisés en rituels et en lecture symbolique détenaient les livres secrets (dont le fameux Livre de Thot, aujourd’hui perdu ou voilé dans les textes initiatiques). Ils interprétaient les signes célestes, les songes, les présages pour les pharaons et les initiés.

Le pouvoir de divination n’était accordé qu’à ceux ayant atteint une pureté intérieure, par les rites, les jeûnes, et la connaissance sacrée.


IV. L’astrologie égyptienne

Si l’astrologie que nous connaissons aujourd’hui a été codifiée plus tard par les Grecs, elle puise une partie de ses racines en Égypte.

Les Égyptiens utilisaient des décans, divisions du ciel en 36 parties, chacune associée à une divinité ou à un principe invisible. Ces décans permettaient de :

  • Calculer les influences de naissance.

  • Réaliser des talismans astrologiques.

  • Identifier les jours fastes et néfastes pour les actions importantes (naissance, mariage, combat, sacre…).

Les ciel étoilé était vu comme le corps de Nout, la déesse céleste. Chaque étoile était un messager.


V. Destin, âme et divination

La divination n’avait pas pour but de “connaître l’avenir”, mais de s’accorder à Maât, à l’ordre de l’univers. Celui qui devinait sans sagesse risquait de tomber dans l’illusion de Seth, principe du chaos.

L’être humain égyptien était composé de plusieurs parties : le Ka, le Ba, le Ren, le Sheut, le Ib, etc. La divination permettait d’harmoniser ces parties, en révélant les déséquilibres ou les messages du Ba (l’âme ailée).


VI. Héritages : de l’Égypte aux traditions modernes

Nombre de traditions ésotériques (alchimie, tarologie, astrologie, Hermétisme) trouvent leurs racines ou leurs symboles en Égypte. Les Tarots eux-mêmes sont parfois présentés comme héritiers d’un “Livre de Thot” symbolique, contenant les arcanes de la destinée.


Conclusion : Diviner, c’était se souvenir

Dans l’Égypte ancienne, la divination était un art sacré, un chemin de retour vers la vérité originelle. Voir l’avenir, ce n’était pas échapper au destin, mais s’y accorder avec justesse, à travers Maât.

Les prêtres, les sages, les rêveurs, les observateurs du ciel formaient une société où la clarté intérieure était le véritable instrument divinatoire. Tout était signe. Tout était reflet.

Et peut-être aujourd’hui encore, dans nos pratiques modernes de tarot, d’astrologie, ou de lecture d’âme, c’est de cette sagesse que nous tentons de nous souvenir…